Déclaration liminaire de Sud Education 62 à la CAPA des certifié-e-s du 10 juin 2020 relative à l’accès à la hors-classe

vendredi 12 juin 2020
par  SUD éducation 62

Cette CAPA du 10 juin 2020 a concerné le passage à la Hors-Classe de collègues certifié-e-s. On ne peut cependant détacher cette campagne d’avancement professionnel du contexte global : la catastrophe sanitaire a brutalement montré l’évidente nécessité d’un service public solide avec des personnels respectés, et pourtant les « réformes » de l’Éducation nationale et de la Fonction Publique ne sont pas questionnées. Aveuglement ou cynisme ? Il est pourtant clair que les choix effectués pour la Fonction publique participent activement à son affaiblissement et à sa soumission à l’idéologie concurrentielle, incompatible avec l’intérêt de toutes et tous.

Mesdames, Messieurs, membres de cette CAPA,

Cette CAPA concerne le passage à la Hors-Classe de nos collègues. On ne peut cependant détacher cette campagne d’avancement professionnel du contexte global : la catastrophe sanitaire a brutalement montré l’évidente nécessité d’un service public solide avec des personnels respectés, et pourtant les « réformes » de l’Éducation nationale et de la Fonction Publique ne sont pas questionnées. Aveuglement ou cynisme ? Il est pourtant clair que les choix effectués pour la Fonction publique participent activement à son affaiblissement et à sa soumission à l’idéologie concurrentielle, incompatible avec l’intérêt de toutes et tous. Nous reviendrons sur ce point.

Nous examinons ici l’avancement d’échelon et le passage à la hors-classe

SUD éducation Nord/Pas-de-Calais rejette la compétition entre collègues comme la multiplication des statuts et des grades. Un processus d’évaluation des personnels « au mérite » va toujours de pair avec la pratique de l’arbitraire et avec des pressions sur les personnels, au nom d’objectifs bien éloignés des missions réelles d’un service public de qualité.

Le PPCR en échange d’une revalorisation du point d’indice dérisoire valorise selon notre analyse un profil de l’enseignant·e ou du/de la fonctionnaire méritant·e fort inquiétant : il ne suffit pas d’être ponctuel·le·, assidu·e, ni même d’exercer ses missions, d’enseignement ou non, avec sérieux. On attend surtout que les collègues en fassent plus en négligeant l’explosion de leur temps de travail, et sans considération pour la qualité du travail fourni en termes de service public.

Les critères de promotion retenus font souvent la part belle à la capacité à s’épuiser au travail et à la docilité aux consignes de la hiérarchie ; or on note fréquemment sur le terrain l’énergie de celle-ci à soutenir des politiques où la notion d’intérêt collectif est très relative.

D’autre part, nous travaillons déjà dans nos services et établissements avec des collègues qui, pour la même fonction et les mêmes contraintes, touchent des salaires différents et sont victimes d’une précarité qui s’aggrave d’année en année ! Leur situation les rend trop souvent cibles de pressions diverses dans le contexte actuel de dérives managériales dans l’Éducation nationale.

SUD éducation 59-62 s’oppose à tous les systèmes de primes qui divisent les personnels et qui renforcent le pouvoir hiérarchique au détriment du travail collectif de service public. La réforme des CAP montre bien, quant à elle, l’état réel du dialogue au sein de l’institution, bien loin des déclarations d’intention.

S’il s’agit de motiver davantage les personnels, qu’on en finisse une fois pour toutes avec la répression dans l’Éducation nationale, qui va des pressions au quotidien que nous avons brièvement évoquées, aux sanctions contre les personnels qui ont elles et eux une haute idée du service public d’éducation, comme les trois collègues enseignants de Melle ou le collègue assistant d’éducation à Strasbourg qui se sont mobilisé·e·s contre les E3C.

S’il s’agit de motiver davantage les personnels, il paraît également indispensable d’annuler – plutôt que de la suspendre en raison du contexte sanitaire – la réforme des retraites envisagée, et de renforcer le système par répartition et la solidarité collective.

S’il s’agit de motiver davantage les personnels, qu’on nous donne d’abord les moyens d’exercer notre mission de service public en facilitant au quotidien l’exercice professionnel, en créant les milliers de postes nécessaires, en cessant de précariser chaque année davantage de personnes… et en mettant fin une bonne fois pour toute à la baisse continue de la valeur des rémunérations.

A ce titre, SUD éducation 59-62 appelle à un plan d’urgence dès la rentrée. Nous allons y revenir.

L’actualité professionnelle dans l’Éducation nationale ne peut qu’inquiéter

Pour SUD éducation 59-62, non, le projet du gouvernement et du ministère en matière de déconfinement ne permet pas de lutter contre les inégalités scolaires. La réouverture des établissements est précipitée et pourrait être dangereuse – parce que la possibilité d’une contamination existe toujours pour l’instant, mais aussi en raison de la dégradation des conditions de travail qu’elle implique. Il y a un risque pour la santé et un risque psycho-social.

Depuis le 11 mai, les équipes des établissements subissent une pression et un stress renforcés dus à de multiples incertitudes quant aux modalités et à des conditions de reprise pensées pour ne pas contredire le ministre, sans tenir compte des besoins pédagogiques réels au sortir du confinement, ni de l’engagement exceptionnel des collègues, au-delà de leurs statuts, pour garder un contact avec le plus grand nombre d’élèves possible.

Dans une circulaire récente, Madame la rectrice évoquait « l’empathie et la disponibilité des personnels de direction ». SUD éducation Nord/Pas-de-Calais s’interroge au contraire quant à l’application concrète des circulaires sur les conditions de la reprise et les protocoles sanitaires.

Certain·e·s chef·fe·s d’établissement ont en effet d’ores et déjà devancé la reprise et convoqué des réunions en présentiel, en contradiction avec la réglementation exceptionnellement en vigueur, pour permanences physiques, des Conseils d’enseignement ou des Conseils de classe.

Le télétravail n’a pas toujours été privilégié « dans la mesure du possible » comme indiqué par les circulaires. Des assistant·e·s d’éducation ont été convoqué·e·s pour des permanences, et nous attirons votre attention sur la situation des personnels AESH : dans certains établissements, il est affirmé que les consignes de distanciation ne les concernent pas, ou le matériel suffisant pour se protéger ne leur est fourni que chichement.

Ils et elles subissent par ailleurs des injonctions de présence au nom de l’horaire à effectuer, quitte à leur imposer des missions en dehors de leurs contrats, qui plus est sans signature d’avenant. Le chantage au contrat n’a pas disparu malgré l’affirmation d’un renouvellement automatique des contrats suggéré par la note de service « protocole AESH » relative aux conditions de reprise.

La circulaire de 2019 relative aux AESH est d’ailleurs très claire : « 3.1. Les missions que peuvent se voir confier les AESH sont précisées par la circulaire du 3 mai 2017 susvisée. Les agent·e·s ne doivent pas se voir confier par les services académiques, par les écoles ou les établissements des tâches ne figurant pas dans les textes qui leur sont applicables ». Or nous avons été alerté·e·s de nombreux abus. SUD éducation Nord/Pas-de-Calais demande par conséquent à ce sujet la rédaction urgente d’une mise au point très claire à destination des chef·fe·s d’établissement.

La situation actuelle est assez anxiogène, toutes ces injonctions ou menaces ne font qu’accroître les risques psycho-sociaux chez beaucoup trop de personnels. Nous prenons donc la responsabilité de vous alerter à ce sujet.

Par ailleurs, l’autonomie des établissements entraîne de fortes inégalités entre les collègues pour le protocole sanitaire et pédagogique mis en place (strict mais souple) puisque chaque établissement décide. Emplois du temps et groupes-classes remaniés, gestion du travail à la fois en présentiel et en distanciel notamment pour les enseignant·e·s, mise en place de « brigades de remplacement et de surveillance » sur la base d’un volontariat relatif pour les collègues… Un cadrage bien plus clair des missions à destination des principaux et proviseurs, et dans le respect des statuts et contrats, manque tout particulièrement.

Enfin, des collègues ont reçu des fins de non-recevoir de la part de la médecine de prévention, qui évoque la reprise des rendez-vous en septembre, par exemple pour certaines demandes relatives aux RQTH – qui doivent être traitées maintenant. On peut donc s’interroger sur le dispositif d’accompagnement sanitaire…

Dans ce contexte, la consultation des CHSCT, l’usage du droit de retrait voire la discussion autour du droit de grève restent d’une grande actualité.

Loin du mythe officiel de la « continuité pédagogique » : un plan d’urgence est nécessaire

A cette date, on n’a toujours pas de plan global pour le retour de tou·te·s les élèves de l’école aux lycées. Quid de la rentrée de septembre ? Que d’incertitudes ! On vit dans l’attente de la prochaine interview du ministre de l’Éducation nationale ou du premier ministre…

Nous rappelons qu’il ne peut y avoir de « continuité pédagogique » comme le martèle depuis des semaines le ministère : des élèves ont totalement décroché, d’autres ont eu de grandes difficultés à travailler essentiellement sur la base de documents écrits et sans interaction en direct avec un·e enseignant·e. Les conditions de la reprise ne sont au mieux qu’un suivi et ne réduiront pas les inégalités scolaires déjà importantes qui ont explosé dans la période.

Or pendant ce temps de confinement et déconfinement, les CA en distanciel entérinent les DHG prévues auparavant et les baisses de moyens, décidées cette année ou les précédentes, sont confirmées tout particulièrement en collège et en éducation prioritaire.

Et alors même que le ministre prétend aujourd’hui être fortement engagé dans la lutte contre les inégalités scolaires, l’Éducation nationale ne revient pas sur la suppression des moyens de lutter contre les inégalités scolaires et sociales. Elle demande en revanche aujourd’hui aux personnels de pousser encore plus loin leurs efforts, mais il n’est pas question de trouver des solutions efficaces pour lutter contre les inégalités.

Cela passerait nécessairement par une attention plus grande portée à tou·te·s les élèves, pour que cette cohorte n’ait pas à subir de plein fouet les conséquences de la catastrophe sanitaire, et pour que les progrès scolaires concernent tou·te·s les élèves. Et pour cela, comment y aller par quatre chemins ? Il est indispensable d’avoir les moyens à hauteur des ambitions, donc des effectifs de classe permettant de le faire !

SUD éducation Nord/Pas-de-Calais alerte sur ce double discours, revendique des moyens à hauteur des ambitions affichées, et des postes en nombre pour permettre d’alléger les effectifs de toutes les classes. Dans l’intérêt de tou·te·s les élèves, un plan d’urgence pour l’Éducation est nécessaire dès la rentrée 2020 !

Nous revendiquons :

• le recrutement d’AESH, de médecins scolaires, de psychologues scolaires et l’ouverture de dispositifs Ulis et UPE2A, afin de couvrir tous les besoins d’aides spécifiques des élèves sur le temps scolaire ;
• des moyens afin de garantir une scolarité pour tou·te·s les mineur·e·s isolé·e·s ;
• la révision des cartes scolaires et un moratoire sur toutes les suppressions de
postes ;
• des créations de postes pour permettre l’accompagnement de chaque élève dans sa scolarité et en priorité dans l’Éducation prioritaire qui subit des coupes drastiques ;
• l’augmentation du nombre de postes de remplaçant·e·s titulaires, afin de pourvoir aux remplacements nécessaires tout au long de l’année scolaire notamment lors des journées de formations et des autorisation spéciales d’absences ;
•la titularisation de tou·te·s les stagiaires ;
• la reconnaissance du rôle essentiel des AESH et leur titularisation sur statut de
fonctionnaire.

Le système PPCR continuant dans la même logique, SUD éducation 59-62 ne participera pas aux échanges de cette CAPA, qui reviendraient à déclasser un ou une collègue pour permettre à un ou une autre de remonter dans le classement d’accès à la Hors-Classe, dans une logique de quota bien réelles malgré des dénégations langagières du rectorat.

SUD éducation 59-62 milite pour une réduction du temps de service des enseignant·e·s devant élèves qui permette la concertation des équipes et les échanges pédagogiques entre collègues.

SUD éducation 59-62 revendique une nette revalorisation à commencer par les bas salaires. Les seules modalités valables concernant les carrières professionnelles au sein d’un service public d’éducation dédié à l’émancipation s’appuient sur la déconnexion complète entre l’évaluation purement formative et coopérative et sur une évolution des carrières et rémunérations identiques pour tou·te·s.

Enfin, SUD éducation 59-62 revendique le rétablissement de tous les moyens supprimés et la mise en place d’un plan d’urgence pour l’Éducation nationale dès la rentrée scolaire. Compte tenu de nos remarques, SUD éducation 59-62 quittera la séance après l’ensemble des déclarations.


Documents joints

Déclaration liminaire de SUD éducation 59/62 (...)